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“Backfill”, le nouveau standard ?

Le “backfill” est le signe sémiologique à la mode dans la recherche par l’IRM d’une sacro-iliïte. Cette anomalie structurale, observée en pondération T1, témoignerait de l’ossification progressive de l’interligne et se traduit par la présence de foyers d’hypersignal T1 au sein même des interlignes sacro-iliaques. Elle représenterait bien le chaînon manquant entre phase active de la maladie et phase cicatricielle sous la forme d’une ankylose articulaire. Décryptage.

Génèse et intérêt du « backfill »

Cette entité est à la mode mais n’est, pour autant, pas si récente. On en trouve une première trace dans un article de l’équipe de Macsymowytch publié en 2012 et étudiant la visibilité des érosions osseuses en IRM. Les auteurs constatent, immédiatement en regard de ces dernières au sein des interlignes, la présence de foyers de “comblement” en hypersignal T1 auxquels ils attribuent ce terme anglais de “backfill” (1).

Par analogie avec ce que l’on connaît désormais au rachis (2) les mêmes auteurs démontrent deux ans plus tard, indépendamment de tout autre facteur, le lien entre ce type d’image et la survenue d’une ossification de l’articulation (3). Ils feront plus récemment la preuve de son rapide développement sous Etanercept ce qui appuie la notion selon laquelle ce traitement accélère au moins dans certains cas la cicatrisation mais également l’ossification des interlignes sacro-iliaques (4).

Aspect du backfill

Le backfill se traduit en IRM par la présence de foyers de signal graisseux et de forme ponctuée ou plus linéaire comblant avant tout des érosions de l’os sous-chondral (1).

Par extension, ces modifications peuvent également concerner des régions moins affectées des interlignes sacro-iliaques au gré de la perte de leur mobilité.

Ce comblement est initialement suspendu au sein des articulations et séparé de l’os iliaque ou sacré sous jacent par une interface de signal faible en IRM correspondant à l’interligne résiduel ou à la condensation osseuse.

Dans un second temps, il entre en continuité avec l’os environnant et poursuit ainsi le processus d’ankylose.

Ces aspects sont élégamment superposables à la présence d’ossifications typiques et parfaitement reconnues en scanner.

Le backfill est assez fréquent puisqu’on l’identifierait sur pas moins de 38% des IRM au stade initial de la maladie (4).

Valeur du backfill

Comme toujours en imagerie, c’est néanmoins la spécificité du signe qui mérite notre plus grande attention car elle évite les faux positifs dont on connaît le caractère préjudiciable et en particulier dans le cadre des spondylarthropathies.

Cette spécificité du backfill est, selon la maigre littérature radiologique déjà disponible, excellente puisque qu’elle atteindrait 96% et 98% dans les séries respectives de Laloo (5) et Hu (6).

Ces chiffres suggèrent bien un avantage théorique majeur sur les autre signes classiques de sacro-iliïte, qu’il s’agisse de l’œdème ou des autres anomalies structurales.

Cette supériorité mérite selon nous d’être quelque peu pondérée si l’on considère deux points distincts. Le premier réside dans le fait que la présence du backfill peut être surestimée devant la présence de foyers d’élévation du signal T1 ne répondant pas d’une ossification mais du cartilage normal ou d’un simple tissu de granulation. À cet égard, ne retenir que les foyers d’hypersignal atteignant l’intensité du tissu spongieux voire des espaces profonds adjacents semble tout autant raisonnable que pertinent.

Le second point réside vraisemblablement dans le choix de la population étudiée car ce backfill s’intègre indéniablement, dans notre brève expérience, dans d’autres processus dégénératifs incluant l’ankylose par hyperostose squelettique idiopathique diffuse, l’arthrose avancée et même l’ostéose iliaque condensante. Dans les deux premiers cas l’âge constitue indéniablement un facteur différenciant qui semble devoir inciter, à l’égal de ce que l’on retient au rachis (7), à n’intégrer le backfill comme critère fiable de diagnostic qu’en dessous de l’âge de 50 ans.

So what ?

Au total, ce comblement articulaire ou « backfill » représente un signe relativement récent et prometteur compte tenu de sa forte spécificité supposée dans le diagnostic d’une sacro-iliïte rhumatismale. Son utilisation doit néanmoins, en IRM et comme toujours dans l’épineux sujet du diagnostic initial des spondylarthrites, s’intégrer au contexte mais également à la présence ou non des autres signes “historiques” de la sacro-iliïte.

Ce thème a été traité par Raphaël Guillin au 40ème Congrès d’Imagerie de Val d’Isère le 16 Mars 2021.

Backfill

“Cette anomalie structurale, observée en pondération T1, témoignerait de l’ossification progressive de l’interligne...”

REFERENCES UTILES

1- Weber U et al. Can erosions on MRI of the sacroiliac joints be reliably detected in patients with ankylosing spondylitis? – A cross-sectional study. Arthritis Res Ther 2012; 24;14(3): R124.

2- Laloo F et al. New bone formation in the intervertebral joint space in spondyloarthritis: An MRI study. Eur J Radiol 2018; 109: 210-217.

3- Maksymowych WP et al. Fat metaplasia and backfill are key intermediaries in the development of sacroiliac joint ankylosis in patients with ankylosing spondylitis. Arthritis Rheumatol 2014; 66: 2958-67.

4- Maksymowych WP et al. Modification of structural lesions on MRI of the sacroiliac joints by etanercept in the EMBARK trial: a 12-week randomised placebo-controlled trial in patients with non-radiographic axial spondyloarthritis. Ann Rheum Dis 2018;77: 78-84.

5- Laloo F et al. MR signal in the sacroiliac joint space in spondyloarthritis: a new sign. Eur Radiol 2017; 27(5): 2024-2030.

6- Hu Z et al. Backfill is a specific sign of axial spondyloarthritis seen on MRI. Joint Bone Spine 2016; 83(2): 179-183.

7- Bennett AN et al. Evaluation of the diagnostic utility of spinal magnetic resonance imaging in axial spondylarthritis. Arthritis Rheum. 2009; 60(5): 1331- 41.


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